Ligne directrice sur le traitement équitable des consommateurs en matière de crédit à la consommation

Juillet 2018

Introduction

Le « crédit à la consommation » s’entend des formes de crédit consenti aux consommateurs (p.ex. : les cartes de crédit, les limites de découvert, les marges de crédit personnelles et les prêts à terme) pour l’achat de biens et services, à l’exception des prêts hypothécaires résidentielsL’expression « prêt hypothécaire résidentiel » s’entend d’un prêt à une personne, garanti par une hypothèque sur un immeuble résidentiel (immeuble d’un à quatre logements). Cette expression englobe également les marges de crédit sur valeur domiciliaire, les prêts à terme et autres produits du même type garantis par un immeuble résidentiel. AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, Ligne directrice sur l’octroi de prêts hypothécaires résidentiels . Sont également exclus du champ d’application de la présente ligne directriceDocument décrivant les mesures qui peuvent être prises par les institutions financières pour satisfaire à l’obligation légale de suivre des pratiques de gestion saine et prudente et à celle de suive de saines pratiques commerciales. , l’octroi de crédit pour fins d’investissement et l’étalement du paiement de la prime par l’assuré à l’assureur dans le cadre d’un contrat d’assurance ou de rente. Bien que l’octroi de crédit pour fins d’investissement ne soit pas spécifiquement visé par les attentes de la présente ligne directrice, l’Autorité considère tout de même que les pratiques d’octroi de ce type de crédit par une institution financière devraient être modulées en tenant compte desdites attentes.

L’Autorité suit de près l’évolution de l’endettement des ménages puisque ce dernier est étroitement lié au risque de crédit des institutions financières. À titre d’exemple, une hausse des taux d’intérêt, un ralentissement de l’économie, une baisse de revenus, un évènement de vie important ou des besoins financiers imprévus pourraient représenter des défis importants pour bon nombre de consommateurs, plus particulièrement s’ils sont déjà ou en voie d’atteindre une situation de surendettement en regard de leurs obligations financières.

Dans cette perspective et dans le contexte des modifications apportées à la Loi sur la protection du consommateurLoi sur la protection du consommateur, RLRQ, c. P-40.1. en 2017 et des attentes émises par différentes organisations internationales telles que le Conseil de la stabilité financière, l’Autorité précise par la présente ses attentes à l’égard du traitement équitable des consommateursObligation des entités réglementées d’agir avec compétence, soin et diligence dans leurs relations avec les consommateurs à toutes les étapes du cycle d’un produit financier. Le traitement équitable des consommateurs (TEC) englobe des concepts comme le comportement éthique, la bonne foi et l’interdiction des pratiques abusives. Pour plus de précisions quant au TEC, veuillez-vous référer à la Ligne directrice sur les saines pratiques commercialesEnsemble des pratiques d’une institution financière visant à faire du traitement équitable des consommateurs un élément central de sa culture d’entreprise. , qui fait notamment état des attentes de l’Autorité quant aux résultats attendus des institutions financières en matière TEC. en matière de crédit à la consommation.

Bien que l’Autorité reconnaisse que les institutions financières sous sa surveillance aient mis en place des pratiques pour évaluer le risque de crédit, elle désire s’assurer, par la présente ligne directrice, que ces pratiques permettent également de détecter, par exemple, par le biais de différents ratios, les consommateurs qui sont déjà ou en voie d’atteindre une situation de surendettementPour les fins de la présente ligne directrice, une situation de surendettement survient lorsque le niveau d’endettement du consommateur est tel qu’il éprouve de la difficulté à s’acquitter de ses dettes dans les délais impartis. et conséquemment, de les traiter de manière appropriée.

 

1. Gouvernance et supervision

L’Autorité s’attend à ce que les institutions financières optent pour des stratégies en matière de crédit à la consommation qui favorisent le traitement équitable des consommateursObligation des entités réglementées d’agir avec compétence, soin et diligence dans leurs relations avec les consommateurs à toutes les étapes du cycle d’un produit financier. .

En sus des attentes générales formulées par l’Autorité dans la Ligne directrice sur les saines pratiques commercialesEnsemble des pratiques d’une institution financière visant à faire du traitement équitable des consommateurs un élément central de sa culture d’entreprise. AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur les saines pratiques commerciales., l’Autorité précise ci-après ses attentes en matière de crédit à la consommation.

Ainsi l’Autorité s’attend notamment à ce que le conseil d’administrationGroupe de personnes élues ou nommées qui est ultimement responsable de la gouvernance et de la supervision d’une institution financière.  :

  • questionne la haute directionGroupe de personnes chargés de la gestion quotidienne d’une institution financière selon les stratégies et les politiques établies par le conseil d’administration. afin d’obtenir l’assurance que les besoins et les intérêts des consommateurs seront pris en considération dans les politiquesEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. et procéduresUne succession imposée de tâches à réaliser. Elle répond en général à des impératifs qui ne sont pas discutables par la personne qui l’applique. en matière de crédit à la consommation et que celles-ci seront révisées au besoin afin, par exemple, de tenir compte des conjonctures financières et économiques;

  • soit informé et satisfait de l’efficacité des mécanismes à identifier les enjeux à l’égard du traitement équitable des consommateurs en matière de crédit à la consommation et à communiquer ces enjeux au personnel concerné;

  • reçoive une information de gestion qui lui permette d’apprécier les situations problématiques soulevées en matière de crédit à la consommation et de réagir en temps opportun, notamment en lien avec le surendettement des consommateurs.

 

2. Conception et commercialisation des produits

L’Autorité s’attend à ce que les produits de crédit à la consommation et les services offerts par les institutions financières soient conçus et commercialisés en tenant compte des intérêts et besoins des consommateurs ciblés.

En sus des attentes générales formulées par l’Autorité dans sa Ligne directrice sur les saines pratiques commercialesEnsemble des pratiques d’une institution financière visant à faire du traitement équitable des consommateurs un élément central de sa culture d’entreprise. , l’Autorité précise ci-après ses attentes en matière de crédit à la consommation.

Ainsi, l’Autorité s’attend notamment à ce que :

  • les politiquesEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. , procéduresUne succession imposée de tâches à réaliser. Elle répond en général à des impératifs qui ne sont pas discutables par la personne qui l’applique. , contrôles et systèmes d’information utilisés en matière de gestion du risque de crédit à la consommation permettent de détecter les consommateurs qui sont déjà ou en voie d’atteindre une situation de surendettementNotamment par le biais de l’utilisation de rapports d’amortissement de la dette tel que le ratio d’amortissement total de la dette (ATD).;

  • les politiques, procédures et systèmes d’information utilisés permettent, indépendamment des modes de distribution utilisés, d’offrir une prestation adaptée aux besoins des consommateurs;

  • la documentation disponible entourant les produits de crédit à la consommation ainsi que les services offerts constituent des outils afin de sensibiliser et d’informer le consommateur quant au risque de surendettementPar exemple, la documentation afférente aux cartes de crédit pourrait aviser le client qu‘afin d’éviter un risque de surendettement ou des frais élevés, il devrait être en mesure de payer le solde de sa carte de crédit à l’échéance.;

  • lorsque cela est applicable, que les personnes traitant les demandes en matière de crédit avec les consommateurs, particulièrement les consommateurs qui sont déjà, ou en voie d’atteindre une situation de surendettement, possèdent l’expérience et les qualifications requises pour les traiter de manière appropriée;

  • des contrôles périodiques ou aléatoires des services rendus soient effectués afin de s’assurer que les politiques et les procédures, notamment les dispositions visant les consommateurs qui sont déjà ou en voie d’atteindre une situation de surendettement sont mises en œuvre de façon à ce qu’elles servent les intérêts des consommateurs.

 

3. Capacité de remboursement

L’Autorité s’attend à ce que les institutions financières s’assurent que le consommateur ait la capacité de s’acquitter de ses dettes dans les délais impartis ou conformément au contrat s’il s’agit d’un crédit dont le montant est à la libre utilisation de l’emprunteur.

L’Autorité s’attend à ce que l’institution suive les étapes habituelles d’un processus d’octroi de crédit, c’est-à-dire la cueillette, la validation des renseignements sur le consommateur et l’évaluation de la capacité de remboursement.

L’institution devrait vérifier les antécédents de crédit de l’emprunteur en se référant notamment à son dossier de crédit. Elle devrait faire preuve de rigueur lorsqu’elle vérifie le revenu de l’emprunteur, par exemple, en étant vigilante par rapport à des revenus considérés instables.

Pour une évaluation adéquate de la capacité financière de l’emprunteur de rembourser le crédit sollicité et toutes les autres dettes, l’institution devrait utiliser les ratios les plus courants tels que le ratio d’amortissement total de la dette. Le calcul de ce ratio devrait prendre en compte les engagements financiers liés à l’habitation et à toutes autres dettes (p. ex., contrats de crédit ou de location à long terme, paiements périodiques minimaux).

Les institutions financières peuvent disposer d’une certaine quantité de renseignements sur leurs clients. Selon les circonstances, ceux-ci peuvent leur permettre d’octroyer du crédit à la consommation sans que cela nécessite une évaluation exhaustive de leur capacité de remboursement, dans la mesure où aucun changement n’est survenu dans la situation financière du consommateur depuis la dernière évaluation.

Toutefois, lorsque l’institution constate ou estime être en présence d’un consommateur déjà, ou en voie d’atteindre une situation de surendettement, l’Autorité s’attend à ce que celle-ci fasse preuve d’une diligence accrue, notamment en :

  • procédant à une analyse de sa situation financière qui tient compte de sa capacité de s’acquitter de ses engagements financiers actuels et futurs raisonnablement prévisibles;

  • offrant, lorsqu’approprié, des outils lui permettant d’évaluer sa situation financière ou lui fournissant les coordonnées d’une ressource compétente apte à le conseiller ou lui offrir un appui dans l’élaboration d’un exercice budgétaire exhaustif.

 

4. Information destinée aux consommateurs

L’Autorité s’attend à ce que les institutions financières s’assurent que les consommateurs disposent d’une information qui leur permet de prendre une décision éclairée en matière de crédit.

En sus des attentes générales formulées par l’Autorité dans sa Ligne directrice sur les saines pratiques commercialesEnsemble des pratiques d’une institution financière visant à faire du traitement équitable des consommateurs un élément central de sa culture d’entreprise. , l’Autorité précise ci-après ses attentes en matière de crédit à la consommation.

Ainsi, l’Autorité s’attend notamment à ce que l’information communiquée au consommateur indique les étapes du processus d’examen de sa demande de crédit et les coordonnées lui permettant d’obtenir de plus amples informations ou explications, le cas échéant. L’Autorité s’attend également à ce que les informations suivantes lui soient communiquées :

  • les revenus et les engagements financiers qui ont été pris en compte dans l’évaluation de sa capacité de remboursement ou d’autres facteurs pertinents aux fins de l’évaluation du risque de crédit, comme les actifs et les passifs de l’emprunteur (valeur nette);

  • les principales caractéristiques du contrat de crédit incluant le coût total, les droits et obligations des deux parties (prêteur et emprunteur) tout au long du cycle de vie du contrat de crédit;

  • les modalités du contrat de crédit et la façon dont elles fonctionnent;

  • les conséquences pour le consommateur advenant le non-respect des conditions, telles que le défaut d’un versement à la date fixée, le défaut de rembourser le crédit à l’échéance ou tout autre aspect ou caractéristique du contrat pouvant entraîner des pénalités, des charges d’intérêt ou tout autres frais en sus du taux de financement;

  • si une assurance est une condition à l’octroi du crédit demandé, son coût, ses caractéristiques, ses limites ainsi qu’une indication au consommateur qu’il peut se procurer une telle assurance auprès d’un intermédiaire de son choix inscrit auprès de l’Autorité ou encore, qu’il peut remplir cette obligation au moyen d’une assurance qu’il détient déjà lorsque la couverture satisfait aux conditions demandées par l’institution;

  • si l’institution détient une hypothèque immobilière qui permet de garantir tout autre crédit que celui à l’occasion duquel son client a accepté de lui consentir ladite hypothèqueCommunément appelée l’hypothèque parapluie, elle permet au prêteur de conserver un droit sur l’immeuble non seulement pour le crédit consenti pour en faire l’acquisition, mais également pour les autres dettes actuelles ou futures contractées auprès du même prêteur, telles qu’une marge de crédit, une carte de crédit, un prêt automobile, etc., l’institution devrait en informer le client et, dans la mesure où l’acte constitutif de l’hypothèque le prévoit, l’informer également de son choix de consentir ou non, à ce que le nouveau crédit sollicité soit garanti par l’hypothèque;

  • toute autre information pertinente à laquelle le consommateur pourrait se référer.