Ligne directrice sur la gestion du risque de liquidité
- Introduction
- 1. Risque de liquidité
- 2. Gestion saine et prudente du risque de liquidité
- 3. Évaluation de l’adéquation du niveau de liquidités
- 3.1 Identification des sources du risque de liquidité
- 3.2 Gestion de risques intrajournaliers et gestion des sûretés
- 3.3 Mesure du risque de liquidité
- 3.4 Détention d’actifs liquides
- 3.5 Impact du niveau de capitalisation des institutions financières dans la gestion du risque de liquidité
- 3.6 Gestion du risque de liquidité par la gestion actif-passif
- 3.7 Gestion intragroupe
- 3.8 Analyses par scénarios et simulations de crise
- 3.9 Communication financière en matière de liquidité
- 4. Atténuation du risque de liquidité
- 5. Gestion de crise
Mars 2019
IntroductionLa présente ligne directrice a été publiée pour la première fois en avril 2009
La liquidité est un facteur essentiel à la viabilité de toute institution financière, une mauvaise gestion du risque de liquidité pouvant se traduire par des coûts excessifs de financement et une difficulté à liquider les actifs à leur juste valeur. Ce risque peut être accentué si la réputation de l’institution est atteinte.
De même, le niveau de capitalisation d’une institution financière peut affecter sa capacité à obtenir des liquidités en période de crise, d’où l’importance pour l’ensemble des institutions financières de bien évaluer l’adéquation de leurs fonds propres en fonction de la liquidité des marchés sur lesquels elles opèrent.
La présente ligne directriceDocument décrivant les mesures qui peuvent être prises par les institutions financières pour satisfaire à l’obligation légale de suivre des pratiques de gestion saine et prudente et à celle de suive de saines pratiques commerciales. a pour objectif d’énoncer les attentes de l’Autorité en matière de gestion du risque de liquidité par les institutions financières. Les diverses lois sectorielles administrées par l’Autorité habilitentLoi sur les assureurs, RLRQ, c. A-32.1, article 463; Loi sur les coopératives de services financiersPersonne morale regroupant des personnes ayant des besoins économiques communs et qui, en vue de les satisfaire, s’associent pour former une institution de dépôts et de services financiers. , RLRQ, c. C-67.3, article 565.1; Loi sur les institutions de dépôts et la protection des dépôts, RLRQ, c. I-13.2.2, article 42.2; Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d’épargne, RLRQ, c. S-29.02, article 254. cette dernière à donner des lignes directrices aux institutions financières pouvant porter sur toute pratique de gestion saine et prudente. En plus de s’inspirer majoritairement des principes fondamentaux énoncés par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaireBASEL COMMITTEE ON BANKING SUPERVISION, BANK FOR INTERNATIONAL SETTLEMENTS. Principles for Sound Liquidity Risk Management and Supervision, September 2008. (le « Comité de Bâle »), la ligne directrice mise à jour prend également en compte les principes de l’Association internationale des contrôleurs d’assurance (IAIS).
Par ailleurs, l’actualisation de la ligne directriceÀ l’instar des institutions financières qui étaient déjà assujetties à la Ligne directrice avant le 31 mars 2019, l’Autorité s’attend à ce que les institutions financières nouvellement assujetties modulent la mise en œuvre des principes en fonction de l’importance de leur exposition au risque de liquidité. innove également en mettant en place un processus d’évaluation de l’adéquation du niveau de liquidités afin d’améliorer la discipline de marché et de renforcer l’encadrement du risque d’insolvabilité des institutions financières.
Ainsi, les principaux thèmes abordés dans cette ligne directrice sont :
-
la gestion saine et prudente du risque de liquidité;
-
l’évaluation interne de l’adéquation du niveau de liquidités;
-
l’atténuation du risqueUtilisation de techniques visant à réduire le risque de crédit, notamment via la prise de sûretés de premier rang, de garanties de tiers, etc. de liquidité;
-
la gestion de crise.
1. Risque de liquidité
La liquidité s’entend de la capacité d’une institution financière de respecter ses échéances financières, actuelles et anticipées, sans perturber les opérations courantes et sans enregistrer de pertes considérables.
Ainsi, le risque de liquidité découle des difficultés ou de l’incapacité d’une institution financière à honorer ses engagements en termes de liquidité en temps opportun et à des coûts raisonnables. Le risque de liquidité peut s’étendre également à l’incapacité de l’institution financière à exploiter les opportunités d’affaires et à soutenir la croissance prévue dans le cadre de sa planification stratégique (risque stratégique) compte tenu d’un manque de liquidité ou de difficultés de financement à des coûts raisonnables.
Le risque de liquidité peut prendre deux formes : le risque de liquidité de financement et le risque de liquidité du marché. Alors que le premier renvoie à l’incapacité de l’institution financière de s’acquitter de ses engagements présents et futurs, prévus et imprévus sans nuire à ses opérations journalières ou à sa situation financière, le second fait référence au risque qu’une institution financière ne puisse pas revendre des actifs négociables au prix du marché courant en raison des perturbations sur le marché des liquidités.
2. Gestion saine et prudente du risque de liquidité
La présente ligne directriceDocument décrivant les mesures qui peuvent être prises par les institutions financières pour satisfaire à l’obligation légale de suivre des pratiques de gestion saine et prudente et à celle de suive de saines pratiques commerciales. privilégie une approche basée sur des principes et n’impose pas d’exigences quantitatives en termes de ratios ou de seuils pour la gestion du risque de liquidité. Dans le cadre de cette approche, l’Autorité s’attend à ce que les institutions financières définissent des limites quantifiables, établissent un plan de contingence fiable et mettent en place des stratégies de gouvernance cohérentes permettant l’atténuation du risqueUtilisation de techniques visant à réduire le risque de crédit, notamment via la prise de sûretés de premier rang, de garanties de tiers, etc. de liquidité.
2.1 Gouvernance et gestion du risque de liquidité
L’Autorité s’attend à ce que la haute directionGroupe de personnes chargés de la gestion quotidienne d’une institution financière selon les stratégies et les politiques établies par le conseil d’administration. de l’institution financière établisse un cadre de gestionEnsemble des politiques, procédures et mécanismes de contrôle visant à assurer la gestion des principales fonctions d’une organisation. du risque de liquidité qui va permettre de préserver sa viabilité tout en répondant aux attentes relatives à la liquidité et les objectifs internes, en temps normal et en temps de crise.
En établissant son cadre de gestion du risque de liquidité, l’institution financière devrait déterminer le niveau de tolérance au risqueLa tolérance au risque fixe des limites à l’ampleur des risques qu’une institution financière est disposée à accepter selon son appétit pour le risque. de liquidité en tenant compte de sa stratégie commerciale, de sa situation financière et de sa capacité de financementAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur la gestion intégrée des risquesEnsemble de pratiques et de processus s’appuyant sur une culture de risques et favorisant l’utilisation de techniques permettant d’améliorer le processus décisionnel et le rendement grâce à une vision holistique de l’ensemble des risques de l’institution financière. ..
La haute direction devrait, en plus de veiller à ce que l’institution financière s’autoévalue, mettre en place des contrôles internesL’ensemble des mécanismes de contrôle mis en place au sein de l’institution financière pour donner aux instances décisionnelles une assurance raisonnable que les objectifs d’efficacité et d’efficience des opérations, de protection des actifs, de fiabilité des informations et de conformité sont atteints. réguliers des dispositifs de gestion du risque de liquidité. Elle devrait également veiller à l’exécution du plan de contingence adopté par le conseil d’administrationGroupe de personnes élues ou nommées qui est ultimement responsable de la gouvernance et de la supervision d’une institution financière. .
La haute direction de l’institution financière devrait élaborer des règles internes précisant clairement les modalités de gestion du risque de liquidité et les diffuser à tous les échelons pertinents de l’institution. Ces règles devraient prévoir un processus d’escalade pour le suivi de la liquidité et la marche à suivre en cas de situations complexes susceptibles d’entraîner des impacts financiers importants.
Par ailleurs, un comité responsable de la gestion actif-passif devrait veiller à ce que la définition des actifs liquides utilisée soit compatible avec l’appétit pour le risqueNiveau global et type de risque qu’une institution financière est prête à prendre pour réaliser son plan d’affaire et rencontrer ses objectifs stratégiques. établi par la haute direction et approuvée par le conseil d’administration.
2.2 Stratégies, politiques et procédures
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière dispose d’une stratégie efficace de gestion du risque de liquidité et mette en place une politiqueEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. et des procéduresUne succession imposée de tâches à réaliser. Elle répond en général à des impératifs qui ne sont pas discutables par la personne qui l’applique. qui traduisent cette stratégie sur le plan opérationnel.
L’institution financière devrait établir une stratégie de gestion du risque de liquidité afin d’assurer une gestion adéquate des liquidités au jour le jour et d’autre part, de protéger le capital de l’institution financière, de maintenir la confiance des marchés, de saisir les opportunités d’affaires et de soutenir la croissance prévue.
De plus, l’institution financière devrait prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que ces objectifs demeurent atteints en période de crise, afin de minimiser le recours à la liquidation à perte de ses actifs ou au financement à des coûts élevés ou à des conditions désavantageuses.
La stratégie de gestion du risque de liquidité devrait comporter tant des aspects qualitatifs que quantitatifs. Ainsi, cette stratégie devrait traiter d’éléments tels que :
-
les responsabilités liées à la gestion du risque de liquidité en période normale et en période de crise;
-
les sources de risque de liquidité émanant de la structure du bilan, du fonctionnement interne, du profil de risqueÉvaluation du niveau de risque global de l’institution découlant de l’évaluation des risques inhérents aux activités d’envergure de l’institution financière, de la qualité de sa gestion des risques, de sa situation financière et de ses pratiques commerciales. et des conditions du marché;
-
les impacts du risque de liquidité, entre autres, sur le besoin de financement, la solvabilité et la réputation;
-
le système d’information soutenant la gestion du risque de liquidité et permettant la divulgation à l’interne de l’information pertinente;
-
la gestion des risques de liquidité intrajournaliers et des sûretésDroit ou charge grevant des biens pour garantir au créancier ou à la caution le paiement de dettes, ou l'exécution d'obligations. BASEL COMMITTEE ON BANKING SUPERVISION, BANK FOR INTERNATIONAL SETTLEMENTS. Principles for Sound Liquidity Risk Management and Supervision, September 2008.;
-
les risques de liquidité liés aux opérations de titrisationAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur la gestion des risques liés à la titrisation. et à l’utilisation des instruments financiersContrat créant un actif ou un passif financier. complexes;
-
les stratégies de financement assurant une diversification effective des sources et formes de financement à une échelle multidimensionnelle telles que des produits, des durées, des entités juridiques et des activités, et qui évaluent la fongibilité des devises;
-
la gestion intragroupe des liquidités;
-
la gestion du risque de liquidité en devises étrangères;
-
l’analyse par scénario et simulations de criseAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur les simulations de crise.;
-
le plan de contingence en cas de crise.
3. Évaluation de l’adéquation du niveau de liquidités
Les institutions financières devraient procéder à une évaluation critique du niveau de leurs liquidités et de leurs besoins futurs en la matière en fonction de leur profil de risque et de leurs plans d’activités. La mise en place d’un processus interne d’évaluation de l’adéquation de la liquidité devrait donc leur permettre de maintenir de façon permanente leurs liquidités à des niveaux suffisants.
3.1 Identification des sources du risque de liquidité
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière identifie les différentes sources du risque de liquidité auxquelles elle est exposée.
L’institution financière ne devrait négliger aucune source potentielle de risque de liquidité, que ce soit au niveau de sa structure du bilan, de ses activités hors bilan, de son exposition aux autres risques ou des conditions de marché.
En ce qui a trait à la structure du bilan, l’institution financière pourrait éprouver des difficultés à honorer ses engagements si les liquidités s’avéraient insuffisantes, non disponibles à l’échéance prévue, ou encore, disponibles, mais à des coûts désavantageux. En ce sens, la gestion du risque de liquidité nécessite une bonne compréhension des caractéristiques en termes de coûts, de disponibilité et de maturité des instruments ainsi que des risques que représentent ses différentes sources de liquidité, et ce, en période normale comme en période de crise. L’institution financière devrait également évaluer l’impact de ses activités hors bilan sur son risque de liquidité et prendre en compte l’éventualité que les risques transférés lui reviennent.
En ce qui concerne la corrélation avec les autres risques, le risque de liquidité peut être une conséquence de l’exposition de l’institution financière à une combinaison de risques (risque de crédit, risque de marchéRisque de pertes sur les positions au bilan et hors-bilan, lié à la variation du prix des instruments financiers sur le marché. , risque opérationnel, risque de réputationRisque engendré par une perception négative de la part des clients, des contreparties, des actionnaires, des investisseurs, des créanciers, des analystes de marchés et autres tiers ou autorités de réglementation, qui pourrait nuire à la capacité de l’institution financière dans la poursuite de ses activités. , risque stratégique, etc.). L’Autorité s’attend à ce que la stratégie globale de gestion de risque de l’institution financière considère le risque de liquidité et sa corrélation avec les autres risquesAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur la gestion intégrée des risquesEnsemble de pratiques et de processus s’appuyant sur une culture de risques et favorisant l’utilisation de techniques permettant d’améliorer le processus décisionnel et le rendement grâce à une vision holistique de l’ensemble des risques de l’institution financière. ..
L’institution financière devrait identifier, pour ses filiales ou autres entités liéesInstitution financière ayant une relation avec une ou plusieurs autres institutions du fait d’un lien de participation directe ou indirecte entre chacune d’elles ou par l’intermédiaire de leurs actionnaires. , les principaux risques sous-jacents auxquels elle pourrait être exposée et en tenir compte dans l’évaluation de l’adéquation du niveau de liquidité.
Au chapitre des conditions de marché, la gestion du risque de liquidité dépend des conditions macroéconomiques (les quantités d’actifs monétaires disponibles sur les marchés) ou d’autres conditions susceptibles d’influencer la capacité des marchés à absorber des ventes d’actifs rapidement et sans baisse significative des prix. Alors que les conditions macroéconomiques résultent de phénomènes économiques à moyen terme, la liquidité de marché est tributaire de la confiance des investisseurs dans la qualité des actifs échangés et dans la solvabilité des emprunteurs. Par conséquent, la liquidité des marchés peut se tarir soudainement. À cet effet, l’Autorité s’attend à ce que l’institution financière assure un suivi régulier des conditions de marché et de leurs impacts sur son risque de liquidité.
En somme, l’institution financière devrait identifier clairement les sources du risque de liquidité qui lui sont propres, leurs impacts sur son profil de risque et sur sa position de liquidité.
3.2 Gestion de risques intrajournaliers et gestion des sûretés
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière, considérant son exposition au risque, gère activement ses positions de liquidité intrajournalières afin de remplir ses obligations de paiement et de règlementExécution définitive d’une transaction, qui comporte la livraison des titres ou instruments financiers par le vendeur à l’acquéreur et la remise d’une somme d’argent par l’acquéreur au vendeur. en temps opportun, en périodes normales et en périodes de crise.
Pour gérer et suivre efficacement ses besoins de financement nets, l’institution financière devrait, lorsqu’elle est exposée au risque de liquidité, être capable de calculer les positions de liquidité sur une base intrajournalière, au jour le jour pour les horizons à court terme et sur une série de périodes plus longues ensuite. Le système d’information de gestion devrait être utilisé dans le cadre de la gestion au quotidien du risque de liquidité afin de vérifier la conformité avec les politiquesEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. , procéduresUne succession imposée de tâches à réaliser. Elle répond en général à des impératifs qui ne sont pas discutables par la personne qui l’applique. et limites établies de l’institution financière.
De plus, les institutions exposées au risque de liquidité devraient concevoir des scénarios de stressAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur les normes relatives à la suffisance des liquidités. qui révèlent quotidiennement des évènements susceptibles de perturber le fonctionnement des systèmes de règlement de paiement et avoir des plans d’urgence pour les gérer. À cet effet, les institutions financières devraient pouvoir contrôler la sortie des fonds et surveiller l’utilisation du crédit intrajournalier. Elles devront également surveiller leur capacité à accéder à des niveaux suffisants de fonds intrajournaliers.
En outre, l’institution financière devrait surveiller l’évolution des marchés et les changements affectant sa notation ou sa situation financière afin de prendre des mesures anticipées comme, par exemple, l’exigence de sûretésDroit ou charge grevant des biens pour garantir au créancier ou à la caution le paiement de dettes, ou l'exécution d'obligations. supplémentaires.
En ce qui concerne la gestion des sûretés, l’institution financière devrait diversifier ses sources de sûretés. Elle devrait également gérer activement les sûretés dont elle dispose (en établissant une distinction entre les actifs de premier rang et les autres) et effectuer un suivi de la personne qui détient ces sûretés ainsi que de leur lieu de détention et vérifier de quelle façon ces sûretés peuvent être mobilisées rapidement.
3.3 Mesure du risque de liquidité
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière mette en place des mesures du risque de liquidité fondées sur une méthodologie cohérente et robuste compte tenu de son profil de risque, de sa taille, de sa nature et de la complexité de ses activités.
La mesure du risque de liquidité implique l’estimation à la fois des besoins de liquidité de l’institution financière et de sa capacité à respecter ses engagements au fur et à mesure qu’ils viennent à échéance. À cet effet, l’Autorité s’attend à ce que l’institution financière adopte des mesures qui reflètent son profil de risque.
L’institution financière devrait disposer d’un modèle de prévision des besoins de liquidité qui tient compte des tendances (court, moyen et long terme) et des cycles (hebdomadaires, mensuels et annuels) affectant la liquidité, qu’ils soient relatifs à ses propres activités ou aux conditions de marché.
Afin d’estimer sur une base prévisionnelle l’exposition au risque de liquidité, l’institution financière devrait utiliser des mesures qui permettent de projeter les flux de trésorerie et les positions futures de liquidité sur une série déterminée d’échéances. Ces estimations devraient porter sur des périodes à court terme (p. ex., cinq jours, un mois). Toutefois, puisque les écarts sont perceptibles à plus long terme, ces estimations devraient également porter sur de longues durées. Les estimations effectuées devraient permettre de relever les vulnérabilités de l’institution financière au risque de liquidité dans les conditions normales comme en période de crise.
Par ailleurs, l’institution financière devrait vérifier que ses sources de financement à moyen et long terme (la titrisation, l’émission de titres de moyen à long terme, la dette obligataire, etc.) soient mises à sa disposition dans des scénarios défavorables. Une institution confrontée à des conditions de liquidité défavorables n’aura souvent pas un accès continu aux différentes sources de financement, ce dont elle devrait tenir compte dans la gestion prospective de sa liquidité.
L’Autorité s’attend également à ce que l’institution financière s’assure que les hypothèses utilisées pour l’estimation du risque de liquidité soient raisonnables, appropriées, documentées et révisées périodiquement afin de s’assurer de leur validité. Pour ce faire, l’institution financière devrait déployer des processus et des mécanismes de contrôle adéquats pour garantir la qualité des données afin d’assurer une prise de décision judicieuse.
Les hypothèses portant sur la liquidité de certaines positions ont une importance particulière. Par conséquent, les principales hypothèses utilisées devraient faire l’objet d’une analyse pour s’assurer qu’elles sont toujours valides compte tenu des conditions de marché actuelles ou probables, y compris les retraits et les versements significatifs non anticipés ou encore l’évolution de l’environnement du marché externe.
L’Autorité reconnaît que les hypothèses peuvent varier d’une institution financière à une autre. Néanmoins, l’institution financière devrait être en mesure de justifier les hypothèses retenues aux fins de l’estimation de son risque de liquidité.
3.4 Détention d’actifs liquides
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière détienne un montant approprié d’actifs liquides lui permettant de répondre adéquatement à ses besoins en période normale comme en période de crise. L’institution financière devrait également détenir des actifs liquides de haute qualitéActifs à faibles risques, dont la valorisation est aisée et sûre, dont l’encours présente une faible corrélation avec des actifs à risque et qui disposent d’une cotation sur une place bien établie et reconnue. , diversifiés et des sources de financement stables.
L’institution financière devrait procéder annuellement à une évaluation interne du cadre de gestionEnsemble des politiques, procédures et mécanismes de contrôle visant à assurer la gestion des principales fonctions d’une organisation. des risques de liquidité. Cette évaluation devrait être documentée et comprendre les informations suivantes :
-
l’identification des principaux risques de liquidité et de financement auxquels l’institution est exposée;
-
la description du procédé d’identification, de surveillance et de mesures;
-
la description des techniques et des ressources utilisées pour gérer et atténuer ces risques.
Le cadre de gestion des risques de liquidité devrait permettre de suivre les positions face aux limites internes établies, d’identifier et de gérer les facteurs de risques pouvant entraîner le dépassement de ces limites compte tenu de la liquidité actuellement disponible et de la liquidité future.
Par ailleurs, l’Autorité s’attend également à ce que l’institution financière établisse des coussins de liquidité internes diversifiés et de qualité élevée et des sources de financement stables qui constitueront sa réserve d’actifs liquides.
En effet, les institutions financières doivent définir quels actifs et quels futurs flux entrants peuvent être considérés comme de la liquidité disponible pour évaluer l’adéquation de leur niveau de liquidité. Ainsi, elles doivent faire la distinction entre les actifs qui resteront très probablement liquides en période de tension et les actifs qui peuvent être utilisés uniquement pour obtenir de la liquidité auprès des fournisseurs de liquidités désignésExemples : Banque du Canada ou fonds d’assurance-dépôts.. Des limites internes devraient être fixées pour ces deux composantes, et il importe d’établir un lien clair entre la taille ciblée des actifs liquides de haute qualité et les risques de liquidité pouvant se concrétiser sur un horizon cohérent avec le modèle d’affaires.
Ainsi, au besoin, l’institution financière pourrait recourir à ces réserves d’actifs liquides de haute qualité et de premier rang pour faire face aux diverses situations de tensions sur la liquidité, en particulier tout incident de nature à tarir ou amoindrir ses sources de financement non sécurisées ou sécurisées et normalement disponibles. La mobilisation de ces actifs ne devrait être restreinte par aucun obstacle de nature juridique, réglementaire ou opérationnelle. De plus, la réserve d’actifs liquides devrait être conçue de manière à respecter en tout temps les exigences de simulations de crise.
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière établisse des limites quant au niveau adéquat d’actifs liquides à détenir en tout temps en regard de son profil de risque de liquidité.
L’institution financière devrait identifier les types, les qualités et les quantités d’actifs liquides à détenir pour répondre adéquatement à ses besoins de liquidité.
À cet effet, l’institution financière devrait fonder son analyse sur la base de critères tels que :
-
la capacité d’absorption par le marché, le temps nécessaire à la liquidation et le prix de vente;
-
le pourcentage détenu;
-
la notation attribuée à l’actif par une agence de notation;
-
la devise de l’actif;
-
la date d’échéance, en considération de la possibilité d’un rachat ou d’une vente anticipée;
-
la possibilité d’utiliser l’actif comme contrepartie pour l’emprunt de fonds ou pour des opérations de mise en pensionTransaction par laquelle la vente d’un actif s’accompagne d’un engagement simultané de rachat du même actif à un prix prédéterminé après une période donnée. ;
-
la concentration par type d’actif, par contrepartie, par localisation géographique et par secteur économique.
L’institution financière devrait s’assurer que son processus de gestion du risque de liquidité comporte une évaluation des coûts, des avantages et des risques dans tous les secteurs d’activités importants, y compris les activités dans le cadre desquelles sont créées des expositions potentielles qui peuvent ne pas avoir d’impact direct sur le bilan.
Cette imputation des coûts devrait intégrer des facteurs liés aux périodes anticipées de détention d’actifs et de passifs, les caractéristiques en termes de risque de liquidité du marché et tout autre facteur pertinent, y compris les avantages d’un accès à des sources de financement relativement stables, comme certains types de dépôts de particuliers.
La quantification et l’imputation de ces risques devraient être explicites, transparentes et prendre en compte les répercussions possibles sur la liquidité dans des conditions de tension.
Le cadre analytique devrait être réexaminé en tenant compte de l’évolution des activités et des conditions sur les marchés financiers et devrait donc continuer à faire concorder les incitations à la prise de risque avec les expositions au risque de liquidité. En outre, il faudrait tenir dûment compte des coûts, avantages et risques liés à la liquidité dans le processus d’approbation des nouveaux produits.
Enfin, les institutions financières devraient définir quelles sources de financement peuvent être considérées comme stables aux fins de l’évaluation de l’adéquation de la pérennité de leur financement. Elles devraient également évaluer la stabilité de leur profil de financement sur la base de la diversité (ou de la concentration) des fournisseurs de liquidité, des marchés et des produits de financement et évaluer leur accès au marché en termes de volume et de tarification, compte tenu des charges sur les actifs et de leur évolution attendue au moment de l’exécution du plan de financement.
3.5 Impact du niveau de capitalisation des institutions financières dans la gestion du risque de liquidité
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière considère l’importance de l’adéquation de sa capitalisation dans la gestion de son risque de liquidité et, conséquemment, l’impact potentiel d’une crise de liquidité sur sa solvabilité.
Bien qu’une capitalisation adéquate contribue à une meilleure notation de l’institution financière et améliore ainsi les coûts et la disponibilité des financements, le capital ne représente pas un coussin approprié en cas de crise de liquidité. A fortiori, les actifs d’une institution financière adéquatement capitalisée pourraient ne pas être suffisamment liquides en situation de crise. À l’opposé, une institution financière peut détenir suffisamment de liquidités sans disposer d’une capitalisation adéquate. De même, le niveau de capitalisation d’une institution financière peut affecter sa capacité à obtenir des liquidités en période de crise. Une institution financière dont la solvabilité est menacée pourrait se faire imposer des primes de risque coûteuses, voire même, se voir restreindre ou refuser le financement.
Par conséquent, le lien entre le risque de liquidité et l’adéquation de la capitalisation devrait être convenablement considéré par la stratégie de gestion du risque de liquidité, les analyses par scénarios, les simulations de crise et le plan de contingence.
3.6 Gestion du risque de liquidité par la gestion actif-passifINTERNATIONAL ASSOCIATION OF INSURANCE SUPERVISORS. ICP 16 Enterprise Risk Management for Solvency Purposes, October 2011. INTERNATIONAL ASSOCIATION OF INSURANCE SUPERVISORS. Standard on Asset-Liability Management, Standard N° 13, October 2006. BASEL COMMITTEE ON BANKING SUPERVISION, BANK FOR INTERNATIONAL SETTLEMENTS. Principles for Sound Liquidity Risk Management and Supervision, September 2008. GILBERT, CHARLES. International Actuarial Association, IAA Risk Book - Asset Liability Management. Techniques and Practices for Insurance Companies, , Chapter 13, 2016.
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière structure ses actifs de façon à disposer de suffisamment de fonds liquides et détenir divers titres négociables afin de remplir ses obligations à leur échéance.
Le profil de liquidité d’une institution financière dépend à la fois de ses actifs et de ses passifs et varie en fonction des conditions du marché. La gestion actif-passif (ALM]) consiste à apparier les flux de trésorerie liés aux actifs et aux passifs en période normale, en période de tension ou de catastrophe.
Les institutions financières devraient donc établir une stratégie de gestion ALM qui spécifie clairement la nature, le rôle et l’étendue des activités ALM et leur relation avec le développement des produits, les fonctions de tarification et la gestion des investissements. Cette stratégie ALM devrait considérer l’interdépendance entre tous les actifs et passifs de l’institution en reconnaissant que les corrélations peuvent ne pas être linéaires.
L’Autorité reconnaît qu’il n’y a pas de formules universelles applicables à toutes les institutions financières. Par conséquent, l’institution financière devrait choisir des outils de mesure appropriés, tels que les ratios de liquidité et la modélisation des flux de trésorerie, afin de déterminer son exposition au risque de liquidité.
Ainsi, afin de mettre en œuvre la gestion ALM, l’institution financière devrait être en mesure d’identifier les risques de liquidité potentiels associés au remboursement anticipé des prêts ou à la résiliation anticipée des contrats d’assurance.
Les pertes dues au risque de liquidité peuvent également survenir lorsqu’une institution financière doit emprunter de façon inattendue ou vendre des actifs à un prix plus bas que leur valeur sur le marché. Dans cette perspective, les institutions financières devraient s’assurer en permanence que leur gestion actif-passif s’adapte aux conditions du marché.
L’institution financière devrait également structurer ses actifs pour respecter ses flux de trésorerie prévus à court terme. Elle devrait établir un plan pour faire face à des sorties de fonds inattendues, soit en détenant des actifs liquides supplémentaires ou en ayant une ligne de crédit d’urgence.
L’institution financière devrait enfin s’assurer que la durée de vie moyenne d’un bloc de passifs soit maintenue dans une fourchette précise de la durée de vie moyenne des actifs appariés et que l’incidence d’une variation des taux d’intérêt se situe dans les limites de tolérance.
3.7 Gestion intragroupe
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière prenne en considération les ententes de gestion des liquidités en vigueur au sein de son groupe et qui seraient susceptibles d’avoir un impact sur la gestion de son risque de liquidité.
Les ententes de gestion des liquidités intragroupe peuvent influencer considérablement le profil de risque, la rentabilité, la capitalisation et la réputation d’une institution financière. D’une part, l’institution financière peut être appelée à fournir des liquidités aux autres membres de son groupe et d’autre part, les fonds fournis à l’institution financière par les autres membres du groupe peuvent être retirés ou annulés, particulièrement en période de crise.
La stratégie de gestion du risque de liquidité de l’institution financière devrait prendre en considération les interdépendances entre les différents membres du groupe en termes de liquidités et les impacts de ces liens sur le risque de liquidité de l’institution financière.
Pour chaque entité juridique distincte et pour l’ensemble des entités du groupe, l’institution financière devrait surveiller et contrôler activement ses expositions au risque de liquidité et ses besoins de financement, en tenant dûment compte des éléments de nature juridique, réglementaire et opérationnelle pouvant faire obstacle aux transferts de liquidité.
Même si les sources de financement entre entités d’un même groupe peuvent contribuer à atténuer les problèmes de liquidité d’une entité, l’institution financière devrait tout de même envisager de fixer des limites internes au risque de liquidité intragroupe pour atténuer le risque de contagionLe risque qu’un évènement, interne ou externe, nuise à une entité juridique ou à une partie d’un groupe et s’étende à d’autres entités juridiques ou parties du groupe. en cas de tension. Elle peut aussi fixer des limites au niveau des filiales et des succursales pour limiter la dépendance d’entités connexes à l’égard de financements provenant d’une autre partie de l’institution. Des limites internes peuvent aussi être fixées pour chaque monnaie utilisée par l’institution. Elles devraient être plus strictes lorsque la facilité de conversion entre les monnaies est incertaine, notamment en cas de tension.
De plus, les hypothèses concernant la transférabilité des fonds et des sûretésDroit ou charge grevant des biens pour garantir au créancier ou à la caution le paiement de dettes, ou l'exécution d'obligations. devraient être transparentes dans les plans de gestion du risque de liquidité retenus dans le cadre de la surveillance prudentielle. Elles devraient tenir dûment compte des contraintes réglementaires, juridiques, comptables, de crédit, fiscales et internes qui entravent les mouvements des liquidités et des sûretés et prévoir les dispositifs opérationnels à mettre en place pour procéder aux transferts entre entités et le temps nécessaire à l’accomplissement de tels transferts.
Dans le cas où l’institution financière fait partie d’un groupe, l’Autorité considère que celle-ci demeure responsable de sa propre gestion du risque de liquidité même si cette gestion s’effectue au niveau du groupe.
3.8 Analyses par scénarios et simulations de crise
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière analyse son risque de liquidité en fonction de différents scénarios de tension affectant spécifiquement ou plus généralement l’ensemble du marché, afin de s’assurer que ses expositions courantes au risque de liquidité restent conformes au niveau de tolérance qu’elle s’est fixée. L’institution financière devrait également procéder à des simulations de crise pour adapter ses stratégies de gestion du risque de liquidité, ses politiquesEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. et ses positions et pour mettre au point des plans de contingence efficaces.
Dans le cadre de la gestion du risque de liquidité, les analyses par scénarios et les simulations de crise devraient porter sur les dispositions contenues dans la Ligne directrice sur les simulations de criseAUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. Ligne directrice sur les simulations de crise. et plus particulièrement sur les éléments suivants:
-
Les éventuels resserrements et ruptures au niveau des marchés des prêts non garantis, mais aussi au niveau des marchés des prêts garantis.
- Les simulations portant seulement ou majoritairement sur les prêts non garantis supposent de façon implicite que les prêts garantis seront toujours disponibles en contrepartie d’actifs de haute qualité. Dans le cas d’une crise de confiance sur le marché interbancaire, cette hypothèse pourrait s’avérer inexacte.
-
L’inaccessibilité prolongée aux sources de financement à moyen et long terme (la titrisation, l’émission de titres de moyen à long terme, la dette obligataire, etc.).
- Cette simulation devrait prendre en considération la corrélation qui existe entre les marchés à court terme (marché interbancaire, marché des mises et prises en pension, etc.) et les marchés à moyen et long terme. L’hypothèse selon laquelle l’institution financière pourrait, en cas de crise, recourir ultimement au financement à court terme pourrait ne pas se vérifier si la crise de liquidité affecte la confiance du marché.
-
Les limites de la diversification des sources de financement en période de crise.
- En cas de crise, il est possible d’observer, par exemple, une complète fermeture du marché de la titrisation, une quasi-fermeture du marché obligataire, une baisse des volumes et une réduction des échéances dans le marché interbancaire. La simulation devrait également considérer l’hypothèse que les marchés pourraient être simultanément affectés en plusieurs devises étrangères.
-
La capacité de convertir la liquidité d’une devise à une autre durant les périodes de crise.
- En période de crise, l’institution financière pourrait ne pas être apte à convertir ses liquidités d’une devise à une autre au moment opportun pour les montants nécessaires et aux coûts habituels.
-
Les risques liés aux produits, par exemple, le papier commercial adossé à des actifsContrat d’investissement assorti d’une échéance initiale inférieure ou égale à un an et adossé à des actifs protégés de la faillite (PCAA). et leur l’impact potentiel sur le risque de réputationRisque engendré par une perception négative de la part des clients, des contreparties, des actionnaires, des investisseurs, des créanciers, des analystes de marchés et autres tiers ou autorités de réglementation, qui pourrait nuire à la capacité de l’institution financière dans la poursuite de ses activités. .
- Par exemple, l’institution financière agissant comme promoteur pour un produit structuré pourrait décider d’assumer la responsabilité de le financer en cas de crise même si elle n’est pas légalement tenue de le faire.
Les résultats des analyses par scénarios et des simulations de crise devraient permettre d’une part, d’identifier les lacunes potentielles en matière de gestion du risque de liquidité et d’autre part, permettre d’établir ou de modifier les stratégies de gestion du risque de liquidité afin d’apporter les mesures correctrices (p. ex., révision des limites, réduction des expositions, diversification des sources de financement, accès aux lignes de crédit) pour remédier aux lacunes identifiées par les différents scénarios.
Sur la base des résultats obtenus à l’égard de la position de liquidité de l’institution financière, des limites devraient être établies. Ces limites devraient refléter le niveau de tolérance au risqueLa tolérance au risque fixe des limites à l’ampleur des risques qu’une institution financière est disposée à accepter selon son appétit pour le risque. de l’institution financière. Celles-ci pourraient servir comme indicateurs de crise pour le plan de contingence et permettre l’identification des faiblesses sur le plan de la gestion du risque de liquidité par l’institution financière.
3.9 Communication financière en matière de liquiditéCOMITÉ DE BÂLE SUR LE CONTRÔLE BANCAIRE. Les exigences de communication financière au titre du troisième pilier – dispositif consolidé et renforcé, mars 2017, Tableau LIQA, p. 64. INTERNATIONAL ASSOCIATION OF INSURANCE SUPERVISORS. Insurance core principles, standards, guidance and assessment methodology, ICP 20 Public Disclosure, Standard 20.11, November 2019.
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière divulgue au besoin les informations utiles et pertinentes permettant aux parties intéresséesToute personne ou organisme pouvant être affecté par une décision ou une activité d’une autre partie. d’être informées sur sa position de liquidité et la solidité de son dispositif de gestion du risque de liquidité.
La divulgation des informations utiles et pertinentes devrait être effectuée en considérant le modèle stratégique, le profil de risque de liquidité de l’institution financière. Cette divulgation devrait également prendre en compte les fonctions de l’organisation impliquées dans la gestion du risque de liquidité.
Ces informations pourraient par exemple inclure :
-
la structure organisationnelle et l’encadrement interne de la gestion du risque de liquidité;
-
les rôles et les responsabilités du conseil d’administrationGroupe de personnes élues ou nommées qui est ultimement responsable de la gouvernance et de la supervision d’une institution financière. , de la haute directionGroupe de personnes chargés de la gestion quotidienne d’une institution financière selon les stratégies et les politiques établies par le conseil d’administration. et des comités délégués dans la conception et le fonctionnement de ce cadre;
-
les politiquesEnsemble de principes généraux adoptés par une institution financière pour l'exercice de ses activités en lien avec un sujet donné. sur la diversification des sources et de la durée des financements;
-
une explication de la façon dont sont utilisées les simulations de crise;
-
une articulation de la tolérance au risqueLa tolérance au risque fixe des limites à l’ampleur des risques qu’une institution financière est disposée à accepter selon son appétit pour le risque. de liquidité et une démonstration de la façon dont la conformité à cette tolérance est évaluée;
-
la présentation des plans de financement d’urgence;
-
la politique en matière de constitution de réserves de liquidité;
-
l’inclusion de mesures quantitatives telles que la composition et la taille du stock d’actifs liquides, les valeurs de ratios internes, les positions de bilan et hors bilan, les limites de concentration sur les lots de sûretésDroit ou charge grevant des biens pour garantir au créancier ou à la caution le paiement de dettes, ou l'exécution d'obligations. et les sources de financement (produits et contrepartiesEntité constituant la partie opposée dans un contrat financier ou une transaction.), les expositions de liquidité et besoins de financement au niveau des différentes entités juridiques, des succursales et filiales étrangères, en tenant compte des limites légales, réglementaires et opérationnelles aux transferts de liquidité, et une description des variables utilisées et les limites fixées à ces variables.
4. Atténuation du risque de liquidité
4.1 Diversification des sources de financement
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière maintienne des sources de financement diversifiées et continues.
L’institution financière devrait éviter toute concentration potentielle de certaines sources de financement.
À cet effet, l’institution financière devrait analyser les différentes caractéristiques de ses passifs et leurs impacts sur sa position de liquidité en tenant compte des aspects suivants:
-
l’échéance des passifs et leur volatilitéMesure de l’amplitude des variations de prix d’un actif, habituellement définie par l’écart-type. ;
-
les portions détenues de financement garanti et de financement non garanti;
-
la dépendance :
-
à un seul fournisseur de fonds ou à un groupe lié de fournisseurs de fonds;
-
à un produit ou à un instrument financierContrat créant un actif ou un passif financier. (p.ex. : emprunts interbancaires, opérations de mise en pensionTransaction par laquelle la vente d’un actif s’accompagne d’un engagement simultané de rachat du même actif à un prix prédéterminé après une période donnée. , etc.);
-
au financement intragroupe.
-
-
la localisation géographique des fournisseurs de fonds, leurs secteurs d’industrie ou d’activité.
Afin de limiter la concentration dans les passifs volatiles, l’institution financière devrait analyser les diverses conditions (des pénalités pour retrait anticipé, des clauses de révision de taux d’intérêt, etc.) dont sont assortis ses passifs pour identifier :
-
les passifs stables même en période de crise;
-
les passifs susceptibles d’être retirés progressivement après les premiers signes de crise;
-
les passifs retirés immédiatement.
L’objectif consiste à estimer et à maintenir un niveau approprié de financement principal et à minimiser la dépendance vis-à-vis des sources de financement volatiles. Des limites de concentration devraient être clairement établies et suivies par les systèmes de contrôle du risque de liquidité.
4.2 Accès au marché
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière réexamine périodiquement sa capacité de se financer sur le marché et maintienne des relations de confiance avec ses principaux fournisseurs de fonds en période normale comme en période de tension.
L’institution financière devrait s’assurer qu’elle dispose d’opportunités qui lui permettent d’emprunter ou d’émettre des titres de créancesActif financier assorti d’un passif de contrepartie. sur le marché lorsque nécessaire, et ce, même en période de crise. L’institution financière devrait également élargir ses opportunités de financement et développer des relations solides et durables avec les fournisseurs de fonds.
L’institution financière devrait être apte à estimer sa capacité de se financer en monnaie locale et en devises étrangères sur une base quotidienne et hebdomadaire. Elle devrait s’assurer que sa capacité de se financer couvre adéquatement ses besoins de liquidité.
L’estimation de la capacité de se financer d’une institution financière devrait, entre autres, prendre en considération les facteurs suivants :
-
la taille et les volumes de transactions des marchés;
-
la part détenue du marché;
-
les limites de crédit imposées par les prêteurs;
-
la perception du marché;
-
les conditions du marché;
-
son expérience et son historique en matière d’emprunt.
En vue d’estimer sa capacité de se financer, l’institution pourrait également vérifier son accès au marché, même lorsqu’elle n’a pas de besoin immédiat de financement.
En outre, l’institution financière devrait entretenir et maintenir des relations solides avec les principaux fournisseurs de fonds. Elle devrait, lorsqu’applicable, négocier au préalable des lignes de crédit avec ses principaux prêteurs, assorties de conditions favorables en prévention d’une période de crise.
4.3 Gestion du risque de liquidité en devises étrangères
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière dispose d’un processus adéquat de gestion de ses positions de liquidité pour les principales devises étrangères utilisées dans le cadre de ses opérations.
L’institution financière pourrait utiliser les dépôts ou emprunts en devises étrangères dans le but de financer une partie de ses besoins de liquidité en monnaie domestique ou dans d’autres devises étrangères. L’institution financière pourrait également convertir des liquidités en monnaie domestique pour subvenir à des besoins de liquidité en devises étrangères.
Dans les deux cas, l’institution financière devrait prendre en considération les facteurs suivants :
-
la convertibilité de chaque devise, la volatilitéMesure de l’amplitude des variations de prix d’un actif, habituellement définie par l’écart-type. du taux de change et le délai de disponibilité des fonds en devises étrangères;
-
les conditions des marchés étrangers, incluant leur liquidité et le niveau des taux d’intérêt;
-
l’impact d’une crise potentielle de liquidité sur les marchés étrangers.
L’institution financière devrait également établir des limites pour son exposition au risque de liquidité issue de ses opérations entre la monnaie locale et les principales devises étrangères.
5. Gestion de crise
5.1 Plan de contingence
L’Autorité s’attend à ce que l’institution financière établisse un plan de contingence qui lui permette de gérer adéquatement toute crise de liquidité, indépendamment de sa gravité et de sa durée.
Le plan de contingence a pour principal objectif d’identifier et de documenter les différents processus à mettre en place et actions à entreprendre afin de gérer de façon efficace et efficiente une crise de liquidité.
Les résultats des analyses par scénarios et des simulations de crise devraient être intégrés au plan de contingence. Ces résultats devraient servir de base pour identifier les différentes crises susceptibles d’affecter la liquidité de l’institution financière et estimer la sévérité de ces crises.
L’institution financière devrait dresser une liste d’indicateurs permettant d’identifier les signes avant-coureurs d’une éventuelle crise de liquidité et de déclencher l’activation du plan de contingence. Ces indicateurs de crise pourraient par exemple inclure les points suivants :
-
croissance rapide des actifs, spécifiquement si cette croissance est accompagnée d’une potentielle volatilitéMesure de l’amplitude des variations de prix d’un actif, habituellement définie par l’écart-type. des passifs;
-
concentration élevée dans certains actifs ou sources de financement;
-
dépassements réguliers des limites internes et de celles établies par le régulateur;
-
augmentation des risques associés à un produit ou un service financier (p.ex. tendances négatives et soutenues des défauts de paiement);
-
détérioration significative de la rentabilité, de la qualité des actifs et de la santé financière de l’institution en général (p.ex. baisse de la notation accordée par les agences de notation);
-
difficultés ou incapacités à se financer sur le marché (p.ex. hausse des coûts de financement);
-
exigences de garanties de la part des prêteurs ou demande de garanties additionnelles pour l’exposition au risque de crédit;
-
baisse ou suppression, de la part des contrepartiesEntité constituant la partie opposée dans un contrat financier ou une transaction., des lignes de crédit qu’elles accordaient à l’institution financière;
-
détérioration des positions de flux de trésorerie due à de plus importants désappariementsL’appariement consiste à rapprocher les rentrées et les sorties de fonds relatives aux actifs et aux passifs, du bilan et du hors bilan, dont les dates d’échéance ou de révision des taux d’intérêt correspondent pour une période donnée. d’échéance, surtout pour le court terme;
-
augmentation des retraits sur une très courte période;
Les processus de contrôle du risque de liquidité devraient permettre un suivi rigoureux de tous les indicateurs pouvant annoncer une éventuelle crise de liquidité.
Selon la sévérité et la durée de la crise de liquidité appréhendée, le plan de contingence devrait, entre autres:
-
spécifier les rôles et les responsabilités des différents intervenants;
-
identifier l’information et les données nécessaires à la prise de décision et s’assurer de leur disponibilité rapide et sur une base continue pendant la période de crise;
-
établir la série d’actions à entreprendre vis-à-vis de la clientèle, des intervenants du marché financier, des médias, de l’autorité de réglementation et des organismes d’indemnisation, sur un horizon de temps déterminé, déterminer l’impact éventuel de ces actions relativement à la perception du marché, la réputation de l’institution financière et sa solvabilité;
-
établir les procéduresUne succession imposée de tâches à réaliser. Elle répond en général à des impératifs qui ne sont pas discutables par la personne qui l’applique. de compensation des déficits de liquidité en situation de crise, incluant les circonstances où chaque action sera entreprise;
-
identifier les différentes sources de liquidité, leur disponibilité, les conditions de leur utilisation, leur fiabilité et la priorité selon laquelle elles doivent être utilisées; évaluer également les coûts des stratégies alternatives de financement;
-
inclure les protocoles de communication à adopter pendant la période de crise.
Une gestion adéquate de la divulgation permettrait à l’institution financière d’atténuer l’atteinte à la réputation qui pourrait entraîner des retraits massifs des dépôts ou un coût plus élevé de financement. Ainsi, l’institution financière devrait maintenir une communication efficace sur une base régulière avec l’Autorité, les plus importants prêteurs, les agences de notation, les médias, les clients et les organismes d’indemnisation.
L’institution financière devrait s’assurer que tous les intervenants impliqués à tous les niveaux dans le plan de contingence assimilent leurs rôles et responsabilités et qu’ils sont informés de toutes les modifications qui y sont apportées.
Enfin, le plan de contingence devrait être mis à jour périodiquement en fonction des derniers changements au niveau organisationnel, des pratiques ou du marché, etc. Le plan de contingence devrait également faire l’objet de tests afin de s’assurer de son efficacité et de sa pertinence.